Nouveau dans la maladie alcoolique : Baclophone, pour mieux comprendre le médicament baclofène

20 janvier 2016 jeanyvesnau

Bonjour

Faire de la pharmacovigilance oui, mais autrement. Ne pas tout attendre de Paris, travailler utilement en périphérie. La Direction de la recherche en santé du CHRU de Lille vient d’annoncer une initiative originale : le lancement de la première étude de phase IV en suivi téléphonique de pharmacovigilance des prescriptions de baclofène pour troubles liés à l’usage de l’alcool. Etude baptisée Baclophone. C’est un système de pharmacovigilance participative, basé sur des appels téléphoniques mensuels auprès des patients 1.

Cette initiative sans précédent sera menée auprès de près de huit cents personnes et environ cent cinquante médecins prescripteurs. Autour du CHRU de Lille (agissant en centre investigateur coordonnateur)  vingt cinq centres hospitaliers de la région Nord – Pas-de-Calais – Picardie ont déjà donné leur accord pour participer. Les patients volontaires pourront être inclus dans ces centres ou par le réseau des médecins généralistes délégués et associés à l’étude. . Un comité de surveillance indépendant sera mis en place pour assurer la transparence des données de l’étude. Il est notamment constitué de représentants des associations Aubes, Baclofène et association Olivier Ameisen. Où l’on peut voir les progrès accompli dans la culture du consensus.

Financement public

Point important : pas d’argent pharmaceutique qui dénaturerait l’ensemble ; l’étude est financée conjointement par le Conseil Régional Nord – Pas-de-Calais – Picardie (100.000 euros) et le Groupement Interrégional de Recherche Clinique et d’Innovation du Nord-Ouest (250 000 euros). Baclophone est programmée pour durer trois ans, avec une période d’inclusion de deux ans. La durée de participation pour chaque patient volontaire est de un an. Le rapport final sera rédigé par le Dr Benjamin Rolland, médecin psychiatre  et les conclusions de cette étude seront soumises à une revue internationale.

La chose n’est pas clairement dite mais il s’agit bien ici de pallier le péché originel de la recommandation temporaire d’utilisation (RTU) accordée au baclofène (il y a deux ans après bien des atermoiements) par l’ANSM.  La lourdeur et les contraintes de ce cadre officiel font que très peu de malades alcooliques ainsi traités y sont enrôlés. L’objectif principal de Baclophone est de mesurer en pratique le risque d’arrêt du baclofène lié à un événement indésirable (EI) à l’issue de la première  année de traitement.

Esclaves de l’alcool

Les objectifs secondaires visent à : décrire la nature et la fréquence des différents Evénements Indésirables; étudier l’association de la survenue d’Evénements Indésirables avec la consommation d’alcool, la posologie de baclofène et les traitements psychotropes associés au cours du temps ; étudier l’évolution des consommation d’alcool et du craving ; évaluer la proportion de patients inclus dans la recommandation temporaire d’utilisation.

Les données de Baclophone ainsi collectées par téléphone et analysées seront régulièrement envoyées à l’ANSM. Elles permettront d’obtenir des informations complémentaires sur le profil d’efficacité et de sécurité du baclofène. On se souvient que cette aventure atypique dans le traitement de la maladie alcoolique a commencé il y a près de dix ans avec la parution en France du livre du Dr Olivier Ameisen (1953-2013) : « Le dernier verre » Denoël, 2008. L’Assurance maladie estimait en janvier 2015 que des prescriptions de baclofène avaient été faites à cent mille personnes devenues esclaves de l’alcool.

A demain

1 L’ouverture et l’animation de fils de discussions dédiés sur les forums Internet des associations de patients et médecins, alimentera une observation supplémentaire dont les résultats, s’ils ne peuvent a priori être inclus dans la publication de Baclophone, démontreront le rôle de ces associations dans la mobilisation des malades et leur accompagnement thérapeutique.

http://jeanyvesnau.com/2016/01/20/nouveau-dans-le-traitement-de-la-maladie-alcoolique-baclophone-pour-mieux-comprendre-le-baclofene/