« Un état des lieux concernant la prescription hors AMM du baclofène par les médecins généralistes »

THÈSE DOCTORAT EN MÉDECINE – Mlle SHIN Da-eun

L’alcoolo-dépendance  est reconnue comme maladie depuis le 19e siècle. Aujourd’hui, avec  le développement de « l’addictologie », on sait que  les patients alcoolo-dépendants  doivent bénéficier d’une prise en charge multidisciplinaire au long cours et que, malgré cela, ils restent exposés  à des risques élevés de rechute. En France on estime qu’environ 5% de la population générale souffre d’alcoolo-dépendance. Les médecins généralistes ont une place privilégiée dans le repérage et la prise en charge de ces patients.

             Le traitement de l’alcoolo-dépendance consiste en un sevrage, suivi d’une longue durée de consolidation de l’abstinence. Pour l’aide au maintien de l’abstinence, plusieurs méthodes ont prouvé leur efficacité. Parmi les moyens médicamenteux, il existe seulement trois molécules ayant l’AMM  dans l’indication du traitement des patients ayant des problèmes d’alcool : l’acamprosate et la naltrexone pour l’aide au maintien de l’abstinence et le disulfiram pour la prévention de rechute. Depuis que le mécanisme neurobiologique de la dépendance impliquant le système des neurones dopaminergiques et des récepteurs à GABA est connu, plusieurs études ont été lancées pour rechercher une autre molécule ayant une meilleure efficacité. En 2008, un médicament est médiatisé par la publication d’un livre « le dernier verre » dans lequel, un cardiologue français témoigne de l’efficacité du baclofène (Lioresal®) pour le traitement de son alcoolo-dépendance. Ce livre éveille la curiosité et l’espoir du public, surtout des patients et de leur entourage.

         Les médecins traitants ont vu leurs patients venir demander la prescription de baclofène alors que certains n’avaient pas connaissance de l’efficacité supposée de ce médicament dans le problème de consommation alcoolique. De plus, la Haute Autorité de la Santé n’a pas, à ce jour, confirmé son efficacité dans cette indication ni sa tolérance aux posologies où il est souvent utilisé dans ce contexte. Les nouvelles études réalisées, à ce jour, portent sur des effectifs de plus de cents patients, à des posologies élevées et sur une durée assez longue d’un à deux  ans. Mais il s’agit d’études de faible niveau de preuve scientifique (grade C).

          Alors, quel est l’état actuel, en ville, concernant la prescription du baclofène pour les patients alcoolo-dépendants ? La particularité de la situation fait suggérer que les réactions des médecins généralistes divergent. On ignore quel est le pourcentage de médecins, favorables à la prescription de ce médicament, fortement médiatisé, mais hors AMM. On ne sait pas non plus ce qui  incite  certains médecins à le prescrire, ni ce qui freine son utilisation chez d’autres médecins.

          Deux études contrôlées actuellement en cours en France apporteront sans doute des réponses sur l’efficacité et la tolérance de ce médicament dans l’aide au maintien de l’abstinence à l’alcool.  Pendant cette période de transition, il a paru intéressant de s’interroger sur la fréquence des demandes de prescription du baclofène auprès des médecins généralistes et sur les attitudes de prescription de ces médecins et les éléments qui guident ces attitudes.

          Compte tenu de l’absence d’AMM, on peut s’attendre à des refus de le prescrire chez nombreux médecins.  Mais la pression médiatique, la pression des patients les poussent- ils à le prescrire ?

Un état des lieux concernant la prescription hors AMM du baclofène par les médecins généralistes