Baclofène : on se dirige lentement et sûrement vers une recommandation temporaire d’utilisation dans l’addiction à l’alcool

Paris, le samedi 15 juin 2013 – Un médicament bien connu et peu coûteux offre une efficacité comparable, si ce n’est supérieure, à nombre d’autres molécules dans le traitement de l’alcoolo-dépendance, maladie qui continue à frapper un nombre important de Français. Fortes des études déjà réalisées, des nombreux retours d’expérience à l’étranger et de la conviction des patients et des médecins, les autorités sanitaires vont-elles tout mettre en œuvre pour accorder rapidement une autorisation à ce traitement dans cette indication ? Que nenni. C’est l’histoire de la « saga du baclofène », histoire où les conflits d’intérêts tiennent la part belle à l’intérêt des patients selon le professeur Bernard Granger, responsable du service de psychiatrie de l’hôpital Tarnier à Paris. Ce spécialiste a consacré aux rebondissements de cette affaire plusieurs articles réunis sur le site de la revue Books (http://www.books.fr/blog/la-saga-du-baclofene ). Pour nous, il revient ici sur les derniers épisodes, qui enfin semblent récompenser les efforts des médecins et des patients qui œuvrent depuis des années pour une reconnaissance du baclofène en France.

Par le Professeur Bernard Granger*

La plupart des spécialistes du baclofène se sont réunis à l’hôpital Cochin à Paris le 3 juin 2013 en présence du professeur Olivier Ameisen, qui en a découvert l’intérêt à fortes doses dans la dépendance alcoolique dès fin 2004. En 2008, il a écrit un livre autobiographique relatant sa découverte, Le dernier verre, qui a popularisé le baclofène dans cette indication (voir la saga du baclofène sur le site de la revue Books). Cependant de nombreuses réticences se sont fait jour et persistent, à la fois pour des raisons de conflits d’intérêts et du fait que l’utilisation de cette molécule dans cette indication et à fortes doses n’était soutenue par aucun laboratoire pharmaceutique.

Des dizaines de milliers de patients traités

Malgré cela, grâce surtout aux efforts des associations de patients ayant bénéficié de ce traitement et de médecins qui en avaient observé la grande efficacité (associations Aubes, Baclofène et RESAB), le baclofène est de plus en plus prescrit, comme l’a montré le docteur Weill, de la Caisse nationale d’assurance maladie, lors de la journée du 3 juin. En effet, plusieurs dizaines de milliers de patients reçoivent ce traitement dans l’indication de l’alcoolo-dépendance et sont traités pour leur immense majorité par des médecins généralistes. Les pouvoirs publics ont été interpelés à plusieurs reprises en raison de leur inertie face à un traitement prometteur pour un fléau social dont il est inutile de souligner les ravages.

Baclofène : on se dirige lentement et sûrement vers une recommandation temporaire d’utilisation dans l’addiction à l’alcool