Baclophone, une étude pour soigner l’alcoolisme dans les Hauts-de-France

La voix du Nord – Par Bernard Virel |

Lancée en janvier 2016 dans la région, l’étude Baclophone, qui suit le quotidien de patients alcooliques soignés par le Baclofène, fait apparaître un nombre limité d’événements indésirables. Un ancien malade témoigne aussi de l’intérêt du médicament.

Bruno (1), 51 ans, habite la métropole lilloise. Aujourd’hui, après avoir participé à l’étude Baclophone et pris du Baclofène, il peut dire que ce médicament lui a tout simplement «  sauvé la vie  ». «  Il m’a vraiment beaucoup apporté, dit-il, après des années d’excès.  » C’est très jeune que Bruno a commencé à côtoyer l’alcool : «  J’ai connu très tôt le verre de vin qu’on coupait quand même avec de l’eau, le verre de bière  », poursuit-il. De mauvaises habitudes qui l’ont plongé dans une dépendance totale et surtout fait tout perdre il y a quelques années : sa maison, son travail, sa vie de famille… De quoi justement l’amener encore à boire davantage, avant, il y a trois-quatre ans, de décider à «  se bouger  », sur les conseils de son médecin traitant, de rencontrer un alcoologue, au CHRU de Lille, et de démarrer le Baclofène.

«  En quelques semaines, ma consommation de trente unités d’alcool (2) a été divisée par deux  », raconte-t-il. Ce qui signifiait la fin des «  petits-déjeuners au rosé  » et des journées «  sous la couette  » avec des bières à portée de main, au pied du lit. Une renaissance. Aujourd’hui, pour lui, tout ou presque est sous contrôle : «  Il m’arrive de ne pas boire pendant une semaine ou, quelques jours plus tard, de manière raisonnable.  » De quoi retrouver une vie quasi-normale – du travail notamment – et éloigner les pensées sombres.

Un premier bilan après un an d’étude

Ces bons points à l’actif du Baclofène, Benjamin Rolland, médecin addictologue et responsable scientifique de l’étude Baclophone, lancée au CHRU de Lille, les entend. Même si après un an d’étude – 104 premiers participants – il est pour lui encore trop tôt pour se prononcer sur les véritables bienfaits du médicament. Mais, pour un premier bilan de cette étude, qui doit durer trois à quatre ans, il reconnaît «  avoir vu des patients évoluer très favorablement sous Baclofène  » et que ce traitement «  doit avoir sa place dans l’arsenal du traitement de l’alcool dépendant  ». Pour des personnes qui, au quotidien, consomment au minimum une bouteille d’alcool – huit-dix verres – avec des conséquences sur la vie quotidienne pour elles-mêmes et l’entourage.

300 à 400 patients attendus

Concrètement, le bilan de l’étude, démarrée en janvier 2016, ne laisse apparaître aucun décès, et sur les onze événements indésirables, «  seuls trois peuvent être liés de manière probable ou certain  » au Baclofène, et huit «  de manière possible ou douteuse  ». De quoi permettre de poursuivre l’étude – 300-400 patients attendus – qui, née dans les Hauts de France, est maintenant devenue nationale.

(1) Le prénom a été modifié.

(2) Une unité correspond à 10 grammes d’alcool, à peu près un verre standard.

Une étude désormais étendue à la France

L’étude Baclophone, lancée au CHRU de Lille en 2016 avant d’être étendue à la région normande puis à la France entière, consiste à assurer le suivi des patients traités par Baclofène pour alcoolodépendance, au cours de la première année de traitement. Ce médicament, utilisé dans le traitement de certaines dépendances (notamment aux boissons alcoolisées), est toujours en cours d’évaluation. Le but est de vérifier ce qu’il ressort du Baclofène -et non de la pathologie- dans la survenue d’effets indésirables. Au cours de la première année d’étude, cent quatre patients, volontaires, ont été suivis notamment par un appel téléphonique par mois. Le prochain rapport intermédiaire sera fait au printemps 2018.

Quel que soit le sexe, la région affiche la plus forte surmortalité liée à l’alcool par rapport au niveau national  : +84,6 % chez les femmes, + 62,1 % chez les hommes.

http://www.lavoixdunord.fr/266902/article/2017-11-16/baclophone-une-etude-pour-soigner-l-alcoolisme-dans-les-hauts-de-france