Baclofène : les déboires de l’ANSM l’incitent enfin à revoir sa copie

Publié le 14/10/2015 – Aurélie Haroche – jim.fr

Paris, le mercredi 14 octobre 2015 – « Notre but n’est pas de faire plaisir aux prescripteurs, mais d’assurer la sécurité des patients », tonnait au printemps 2014 le docteur Florent Perin-Dureau, responsable du pôle médicaments du système nerveux central de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Le spécialiste réagissait aux nombreuses critiques formulées par les spécialistes de l’addiction au lendemain de la publication du cadre très restreint de la recommandation temporaire d’utilisation (RTU) du baclofène dans la dépendance alcoolique. Changement de ton aujourd’hui : « La RTU ne semble pas adaptée et nous allons mettre en place un groupe de travail pour y remédier » a reconnu la semaine dernière le patron de l’ANSM, Dominique Martin, à l’occasion d’une mise au point sur les prescriptions de baclofène.

Système de surveillance de l’ANSM : l’abstinence des médecins

Les chiffres ont eu raison de l’entêtement de l’ANSM qui ne peut aujourd’hui que constater l’échec de son système. En effet, si le baclofène continue aujourd’hui à être prescrit à environ une centaine de milliers de personnes en France (en dépit d’une légère baisse ces douze derniers mois que certains attribuent d’ailleurs aux effets contre-productifs de la RTU), le portail mis en place par l’Agence pour réaliser le suivi des effets secondaires et du traitement ne compte que 6 000 malades. Cette très faible proportion, très en-deçà des objectifs des autorités sanitaires qui espéraient recenser 15 000 patients dès les six premiers mois a incité (une fois n’est pas coutume) l’ANSM à l’auto critique.

Mauvaise intention

Enfin, l’Agence accepte d’entendre l’insatisfaction des spécialistes, qui dès la publication des critères de la RTU avaient manifesté leur désaccord, à travers notamment la publication d’un communiqué de la Fédération Addiction, du Réseau Addiction Baclofène et de MG Addictions. La première déception de ces professionnels concernait tout d’abord l’impossibilité pour entrer dans le cadre de la RTU (et  pouvoir « officiellement » bénéficier d’un remboursement de la prescription ; dans les faits même en dehors de la RTU la prise en charge est fréquente, les prescripteurs omettant d’indiquer qu’il s’agit d’un traitement hors AMM) de proposer ce médicament en première intention. « Est-il éthique de lui demander d’échouer avec les autres méthodes avant de réussir avec le baclofène » s’interrogeaient à l’époque les spécialistes de l’addiction. « C’est grotesque, car depuis quelques années, l’essentiel des demandes pour le baclofène vient de patients qui n’ont jamais été pris en charge précédemment pour leur dépendance à l’alcool » renchérit aujourd’hui le professeur Philippe Jaury, cité par Libération.

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